Bozu hmacasë. La rentrée scolaire se fait tout doucement au collège de Tiéta avec la reprise de votre petit hebdo Nuelasin. Nous sommes au numéro 177 comme vous le constatez. Certains lecteurs m’en ont déjà fait la demande pendant les deux semaines de vacances. Je leur ai répondu que je me reposais juste un peu. Cela montrait l’attachement des uns et des autres à leur propre métabolisme, pourrait-on dire. Je leur dis merci.
Plusieurs événements se sont passés pendant les deux semaines de vacances. Elles n’ont pas eu les mêmes charges cérébrales pour tout le monde. Et je m’associe sincèrement par ce numéro aux douleurs de mes lectrices et lecteurs (et à leurs familles) par ces temps douloureux. Je ne cite pas de noms, vous êtes beaucoup trop nombreux et intimité oblige. Sachez seulement que je vous porte aussi dans le cœur et dans la pensée.
Pour accompagner M. Maselo, je vous joins un petit article d’extrait de vie sur la hausse des prix en ces temps difficiles où la situation ne fait pas que des malheureux. Je vous jure ! L’autre texte est de Marguerite Duras extrait de son livre l’Amant sorti en 1984 et porté à l’écran par le réalisateur Jean-Jacques Annaud en 1992. J’ai proposé l’extrait en dictée dans la continuité pédagogique de mes élèves de 4ème. On le corrigera à la rentrée. Quand ? Bonne question.
Je ne vous embête pas plus longtemps. Bonne lecture à vous de la vallée et surtout portez-vous bien. Wws
Dans la petite voiture de Maselo
- Bonjour M. Maselo je voulais me rendre à la bibliothèque de Koné.
- Mme Muliavena, il y a celle de Voh. Dedans vous pouvez faire des recherches. Elle est bien documentée, vous avez le Net en plus. C’est même ouvert le samedi et les vacances scolaires.
- Ah ! C’est intéressant de savoir. Je vais demander à ma fille la raison pour laquelle elle s’entête à vouloir aller sur Koné.
- Mais, c’est votre fille qui prend le bus tous les matins ? Elle est plutôt lève-tôt. Je la vois avec d’autres jeunes gens de son âge. Ils prennent le bus de 7h00-7h30. Ils disparaissent et je les revois le lendemain.
- Et vous appelez cela lève-tôt ?
- Mme Muliavena, il faut se lever avant 7h00 pour prendre le bus. Mon petit-fils à l’heure où je vous parle, dort encore. Regarde, il est déjà 9h00.
- Ah, moi je vais là-bas à cette heure parce que je dois apporter sa clé USB. Une partie des cours de Malia est dedans.
- Elle a du courage votre fille. Il faut l’encourager. Allez je ne vous fais pas payer cette course.
- Merci M. Maselo.
Les prix.
Le dimanche 02 juin, j’ai entendu la maman des enfants dire qu’il y avait une distribution de carburant pour 3000francs par usager à Koné. Sans hésiter, je partis. Arrivé à la station Total, le pompiste mettait de l’essence dans un bidon de 5litres pour une personne qui lui avait demandé quelques temps auparavant. La dame qui s’était jointe au M. me fit signe qu’il n’était pas permis de remplir les jerricans ou des bidons mais le cas échéant était exceptionnel vu que la pompe siphonnait le fond de la cuve. Pipi de chat. Je demandais seulement s’il n’y avait pas de livraison dans la journée. Il me répondit de patienter parce qu’un camion citerne allait arriver sous peu mais qu’il n’était pas au courant de l’heure. Je demandais à la dame si je pouvais lui laisser mon numéro. Elle m’appellerait au moment de l’approvisionnement. Elle refusa catégoriquement. D’autres usagers lui avaient déjà demandé ce service. Je pris la décision de partir pour voir s’il était possible de négocier avec les agents des deux autres stations. Le pompiste coupa net mon élan pour dire que la station Mobile était fermée et l’autre de chez Korail était réquisitionnée pour les véhicules prioritaires. J’étais ainsi condamné à ne pas avoir d’essence ce jour-là. Je décidai d’attendre la livraison par voie miraculeuse qui allait avoir lieu dans la journée en allant sous les bois noirs du bord de la route vers le quartier à quelques encablures de la station. Je pris mon mal en patience en jouant aux jeux sur mon portable. Heureusement que j’avais aussi Internet qui me permettrait de me maintenir en vie. Je n’avais pas senti les deux heures passer ou plus. J’appelai la station un moment pour demander l’arrivée du divin camion de livraison. La voix me reprit pour demander d’où j’avais eu l’information. Je répondis que c’était le pompiste qui me l’avait dit. « Mais M. les camions ne peuvent pas passer les barrages en ce moment. » reprit la voix. Je me rendis à l’évidence. Koné, ce serait pour un autre jour de livraison dans cette éternité. Je démarrai le moteur et partis.
Au rond-point, faisant face à la station, des commerçants avaient pris possession du trottoir. Un fourgon d’achalandage exposait de la marchandise. Il y avait des légumes mais les filets de pommes de terre attirèrent mon attention. Je fis le tour complet du rond-point pour me garer sur la bretelle de la voie sans issue. Le temps que j’allais sortir de l’habitacle, un M. arrivait. Il portait un filet de pommes de terre 5kg, « M. combien c’est ? »: il le lisait sur le mouvement de mes lèvres. « 8000francs ! », s’écria-t-il en se retenant de s’éclater de rire. J’allais m’époumoner. On s’était compris ! Le prix était trop excessif. Même Bernard, un beau frère de Baco n’a pas voulu y mettre ses sous. Il renchérit par contre sur le sujet. « Tu sais Boo, j’ai voulu acheter des croquettes pour mes chiens, un jour de la semaine. J’ai reculé parce qu’en arrivant au magasin, j’ai vu que le prix du sac a augmenté. De 3000francs, il est passé à 7000francs. Je me suis dit que les chiens n’ont qu’à faire un régime spécial. »
Dictée préparée.
Lorsque l’heure du départ approchait, le bateau lançait trois coups de sirène, très longs, d’une force terrible, ils s’entendaient dans toute la ville et du côté du port le ciel devenait noir. Les remorqueurs s’approchaient alors du bateau et le tiraient vers la travée centrale de la rivière. Lorsque c’était fait, les remorqueurs larguaient leurs amarres et revenaient vers le port. Alors le bateau encore une fois disait adieu, il lançait de nouveau ses mugissements terribles et si mystérieusement tristes qui faisaient pleurer les gens, non seulement ceux du voyage, ceux qui se séparaient mais ceux qui étaient venus regarder aussi, et ceux qui étaient là sans raison précise et qui n’avaient personne à qui penser. Le bateau, ensuite, très lentement, avec ses propres forces, s’engageait dans la rivière. Longtemps on voyait sa forme haute avancer vers la mer. Beaucoup de gens restaient là à le regarder, à faire des signes de plus en plus ralentis, de plus en plus découragés, avec leurs écharpes, leurs mouchoirs. Et puis, à la fin, la terre emportait la forme du bateau dans sa courbure. Par temps clair on le voyait lentement sombrer.
Marguerite Duras. L’Amant.












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