Nuelasin n°146 – 21 juillet 2023

Bozusë, une grosse erreur s’est glissée dans le texte qui accompagne le Nuelasin 145. « Deux verbes qui se suivent, le second se met à … » On apprend par cœur et on fait réciter aux élèves mais dans la vie pratique, cette règle nouséchappe, non m’échappe. Non elle n’échappe pas. Je reprends m’échappe parce que je connais des correctrices spécialistes qui voient la chose venir de loin. Je rends hommage à la correctrice qui à un moment, travaillait avec Mme Claudine Jacques. Elle est partie dans l’autre monde. Le temps a ôté son prénom de ma mémoire mais pas son visage ni la parole de Claudine quand elle me l’a présentée à moi: « Wawes, elle est d’une dextérité de chirurgien. » Elle voit tout. Aucune faute ne peut lui échapper. J’en conviens. Je pense à ces gens, qui on dirait, ont l’âme puissante. A l’image de leur écriture. Je voudrai tant leur ressembler. Hélas, Wawes, je ne suis que moi et je sais que je ferai toujours des fautes d’orthographe, de grammaire, de syntaxe etc… Le français n’est pas ma langue. Je m’en sers dans la vie. J’en ai besoin. Je veux seulement être debout avec tout ce moi imparfait. Je remercie la nièce qui a relevé la faute, au fait elle me relève. Merci aux autres lectrices et lecteurs qui me lisent en silence d’en faire autant. Oleti.

Dans la petite voiture de Maselo

  • Bonjour Danielle.
  • Deux L-E
  • Mais cela se voit Mme Danielle. Vous avez quand même gardé vos attributs.
  • N’est-ce pas! Mais je suis toujours fâchée après des gens qui me prennent pour qui je ne suis pas.
  • Oh! Vous vous fâchez pour si peu. Je connais des gens qu’on charrie jusqu’à l’excès. Ils ne se fâchent même pas. Au contraire, on a l’impression qu’ils sont plutôt heureux d’être tournés et retournés dans tous les sens dans cette académie du rire.
  • Vous avez de l’humour vous; M. Maselo. Moi, ce n’est pas mon genre. Je vous jure. Je ne connais pas plaisanter. Et je me fâche pour si peu. Heureusement que je me maîtrise et je me contrôle. C’est avec l’âge. Avant, je souffrais énormément de la chose.
  • Et comment vous faites alors pour rendre la vie supportable?
  • Je crie dessus la personne quand je me sens agressée. Maintenant je le fais de moins en moins.
  • Alors…
  • Je me tais ou je pars. Mais des fois quand c’est plus fort… je pleure. Oui ça arrive.
  • C’est important de pleurer. Vous savez ? Ce n’est pas un signe de faiblesse.
  • Oui, maintenant on le sait. Mais chez nous, la notion de pleurs est toujours incomprise. Une marque de faiblesse pour beaucoup.
  • Pardon, mais c’est vers où que je vous laisse déjà ?
  • À La mine. Sur la route de Tiéta. S’il vous plait…

Do-Kamistement

Je vous livre ici ce que ma fille m’a rapporté la semaine dernière. « Papa, les gens disent que le niveau du Lycée Do-Kamo est faible »: Papa va te répondre ma fille et à tous ces gens qui ont dit ça. Tu sais, quand Do-Kamo venait de s’ouvrir, des gens parlaient déjà comme ça. Je me souviens de cette parole qui avait aussi affecté nos profs. M. Jost qui était notre prof d’histoire/géo disait: « Nous préparons le même Baccalauréat avec nos armes mais nous n’avons pas les armes des autres établissements. Nous n’avons pas leurs moyens. Nous menons le combat avec ce que nous avons. Nos pieds, nos mains, nos ventres et nos rêves surtout. Le résultat, c’est vous. Si vous ne réussissez pas, c’est l’échec des parents et le système que nous avons mis en place. » Je me souviens d’un vieux de Hunöj, quand son fils était venu pour lui annoncer qu’il avait échoué à son examen, le papa l’a repris pour dire: « Mais non fils, c’est papa qui a échoué. » Le papa se lève tôt le matin pour amener son fils à son stage après quoi, il n’arrive plus à dormir. Jusqu’au matin et il fume cigarette sur cigarette pour se maintenir éveillé. Compte rendu de la course, il meurt d’un cancer de poumon…

Pour Do-Kamo, j’ai entendu des lycéens de mon époque me dire que Do-Kamo, c’est faible. J’avais très honte de mon choix et je m’efforçais pour cacher ce sentiment. Eux. Ils étaient au lycée technique et moi en seconde à Do-Kamo. Je ne veux pas dire que j’étais excellent mais à les entendre on dirait des super héros, des surdoués. Arrivé ! On s’est retrouvé quelques années après en France. Ils étaient militaires, ils venaient passer leur week-end chez nous à Grenoble à la cité U de Saint-Martin d’Hères. Il y en avait qui allaient s’engager parce qu’ils n’ont pas réussi dans leur filière avec les moyens qu’ils avaient dans leur lycée. Osi, mais c’est pas vous qui disiez que le niveau de Do-Kamo est faible. J’ai oublié de demander à ma fille, qui c’est l’oiseau de mauvais augure qui lui a donné ces paroles.

S’il n’y a pas Do-Kamo avec son niveau, moi je suis en ce moment à Hunöj ou peut-être que je suis mort, me connaissant.

Do-Kamo est une porte ouverte aux parents qui n’ont pas les moyens financiers et aux enfants qui ont un parcours difficile dès le primaire et le collège. Des océaniens. Ils sont lents à s’ouvrir à la culture de la connaissance. Aux connaissances scientifiques etc… oui mais on s’arrange avec eux parce qu’avant que les parents leur parlent, le personnel de l’institut a déjà compris. Ils s’arrangent pour se plier aux enfants, à leurs enfants, à leurs exigences. Aux capricieux. Moi, c’est Do-Kamo, je n’ai pas compris Do-Kamo mais le vieux Saiko m’a compris. Le vieux Wadawa, M. Tessier, M. Agopian, M. Jost, M. Pierre Ngaiohni… ils ont su se plier et avoir honte pour nous autres étudiants qui tremblions en arrivant dans la capitale. Je suis de Hunöj de loin là-bas aux îles Loyauté miséreuses qu’on ne voit même pas sur la carte du Monde. Nous, qui voulions marcher la tête haute avec notre fierté îlienne, dans un lieu si effrayant et menaçant. Ils nous ont donné la main pour nous accompagner et nous rassurer pour qu’après nous prenions notre envol pour voir notre pays de haut et de très loin. Je le fais maintenant.

Maintenant, je frappe ma poitrine pour me signer et signer aussi pour le pays. Ma fierté a un début et a une fin. Do-Kamo.

Mes enfants ? Vous qui êtes à Do-Kamo et qui vous dites Do-kamiste, le lycée est écrit en lettres de sang. Une lutte s’était engagée pour que nous soyons là où nous sommes. Des êtres en devenir. Pour être le divin Do-Kamo. Ce n’est pas seulement l’école, ni la petite cour en bas, ni la case symbolique refaite. Non, c’est un concept. La chose vers laquelle tout être doit tendre.

J’aime bien que les gens disent que Do-Kamo est faible et même transparent. C’est avec cette faiblesse et cette transparence que l’homme s’élève. Une arme. On grandit avec. Ces gens qui disent que ce lycée est faible, où est ce qu’ils se situent. Sont-ils en haut dans les nuages ou sur la terre du Do-Kamo ?

Il faut être fier de vous. De ce que vous êtes. Vous êtes intéressants et les gens s’intéressent à vous. Vous, vous ne vous intéressez qu’à vous. C’est donc bien. Vous n’avez de compte à rendre à personne sinon à vous-même et bien sûr au pays qui vous porte. Lancez-vous dans vos études et seulement après, allez vers d’autres contrées. Et les gens qui parlent de vous, ils seront toujours là parce qu’ils ont fait une fixation sur vous… foutaise !

Conclusion : Je suis heureux parce que ma fille qui est au lycée là où elle est (pas à Do-Kamo) s’attriste des gens qui parlent du Lycée Do-Kamo. Elle a mal ben oui, mais moi son père, ai aussi mal pour elle et pour le Lycée Do-Kamo. Do-Kamistement (Comme dit toujours Loulou Kakue…) vive moi ! Et Hunöjoisement.

Watrengë Hnacipan.

copyright photo : Lycée Do Kamo

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