Une fin d’après-midi, je suis allé à Katepaik avec mon petit-fils. Je l’ai doucement sorti de la voiture pour le placer dans un caddie — notre petit navire à roulettes — et nous avons navigué au milieu des rayons du magasin. À chaque tour, il riait aux éclats, tendant ses mains vers les étagères débordantes de couleurs et de promesses. Son bonheur était contagieux : les deux caissières de la soirée souriaient, les clients ralentissaient pour le regarder, et moi, je faisais le tour encore et encore, rien que pour prolonger ces petits instants de bonheur.
Soudain, au détour d’un rayon, je croisai Nénés, lecteur fidèle de Nuelasin. Nous nous saluâmes chaleureusement. Un peu plus loin, ce fut Paul, le patron des bus scolaires, qui lança une plaisanterie sur le petit. L’air était léger.
Puis, Coco entra.
Je mis du temps à le reconnaître. Torse nu, pieds nus, il se dirigea d’un pas assuré vers les rayons d’alcool. Il ne me salua pas. À Tiéta, il avait été une douleur sourde, absences chroniques et insolence prématurée. À peine adolescent, déjà grandi par la conduite, mais pas par la formation. Son passage dans nos murs avait laissé des marques.
Dans le magasin, les regards se tournèrent vers lui comme vers une bête sauvage sortie du bois. Il n’avait pas changé. Même taille, même allure, toujours aussi sale, toujours aussi seul. J’étais là, appuyé contre le caddie, silencieux et pensif, observant ce spectre familier du passé.
Mon petit-fils, arrêté dans ses gestes, le regardait lui aussi. Peut-être ressentait-il l’étrangeté, ou simplement l’importance de ce moment, sans pouvoir le nommer.
Nénés, déjà vers les caisses, fit demi-tour pour me saluer une dernière fois. Je le lui rendis en levant la main, tout en gardant Coco dans mon champ de vision. Puis ce dernier franchit la porte de sortie à son tour pour disparaître dans la nuit.
Patitou et moi, nous avons poursuivi notre promenade dans la caverne d’Ali Baba au bon milieu des rayons.
Pour accompagner M. Maselo, je vous propose une petite recherche des surnoms des tribus de Drehu. J’attends un retour de votre part. Bonne lecture à vous.
Wws
Dans la petite voiture de Maselo
M. Maselo : Bonjour Mme Marienne, comment s’est passée votre journée de pêche aujourd’hui ?
Mme Marienne : Bonjour M. Maselo. Pas très bien, malheureusement. Je n’ai pas réussi à vendre toutes mes anguilles. Je suis vraiment déçue.
M. Maselo : Oh, je suis désolé d’entendre ça. Les anguilles sont difficiles à vendre, parfois ?
Mme Marienne : Oui, aujourd’hui, il y avait moins de clients au marché et beaucoup de concurrence. J’ai ramené presque la moitié de ma pêche à la maison.
M. Maselo : Je comprends que ce soit frustrant. Vous avez mis tant d’efforts dans votre travail. Mais rappelez-vous, chaque jour est différent. La prochaine fois sera peut-être meilleure.
Mme Marienne : C’est vrai, mais c’est dur de voir tout ce travail ne pas porter ses fruits. Ces anguilles étaient vraiment grosses et en bonne santé. J’avais vraiment espoir de tout vendre.
M. Maselo : C’est normal d’être déçu, mais ne vous découragez pas. Parfois, les clients ne réalisent pas la qualité du produit. La prochaine fois, peut-être essayerez-vous un autre marché ou une autre stratégie ?
Mme Marienne : Vous avez raison, M. Maselo. Peut-être que je devrais diversifier mes points de vente. Mais ce n’est pas facile de changer.
M. Maselo : Les changements peuvent être difficiles, mais parfois nécessaires. Regardez-moi, par exemple. J’étais maçon avant de devenir taximan. Il a fallu du temps pour m’adapter, mais finalement, c’était la meilleure décision.
Mme Marienne : C’est vrai, votre parcours est inspirant. Peut-être que je devrais aussi envisager de nouvelles idées pour ma pêche.
M. Maselo : Exactement. Et n’oubliez pas, vous n’êtes pas seule. La communauté est là pour vous soutenir. Peut-être que d’autres pêcheurs ont des conseils ou des astuces à partager.
Mme Marienne : Merci, M. Maselo. Vos paroles me réconfortent. Je vais essayer de rester positive et de réfléchir à ce que je peux améliorer.
M. Maselo : C’est l’esprit ! Rappelez-vous que chaque échec est une leçon pour réussir demain. On apprend de nos erreurs et on devient plus fort.
Mme Marienne : Merci beaucoup, M. Maselo. Je suis contente d’avoir parlé avec vous. Cela m’a vraiment aidé à voir les choses sous un autre angle.
M. Maselo : De rien, Mme Marienne. Je suis toujours là si vous avez besoin de parler. Bon courage et tenez bon.
Mme Marienne : Merci encore. Je vais continuer à essayer et à espérer des jours meilleurs.
Les surnoms des tribus drehu
Wetr : Luecila (Zavirob) Nang (Gaiulaz) Kirinata/Ciole (Zeolil) Hnathalo (Samariten/samaritaine) Saint-Paul (Faofor) Tingeting (Amuröz/amoureuse), Hnacaöm (Alema/allemand) Hnanemuaetra (Hnanem) Jokin (Agele, anglais) Mucaweng (Lalumi) Siloam (Maolis) Hunëtë (Nugini) Xepenehe (Igilan) Kumo (Wangekö)
Lösi : Hnase (Hacetranu) Traput (Solacic) Jozip (Caina) Hnaeu (Naligi) Luengöni (Cabien) Joj (Bëikaco) Mou (Kirikitr) Xodre (Nairo) Hunöj (Zapone) Hmelek (Ihmahma) Kejëny (Ladran) Hnadro (Agele) Thuahaik (Co/Thio) Tixa / Hnapet (l’île/l’îlot) Lilozur
Gaica : Qanono (Sinöj/Hnaipolë) Hapetra (Bethela) Drueulu (Neweiok/New-York) Wedrumel (Itreqe)
Je prends un risque pour expliquer l’origine de ces surnoms des tribus de Drehu. Je peux faire beaucoup d’erreurs, mais je compte sur la sagesse (et l’expérience) des lecteurs plus âgés de Nuelasin pour me corriger. On y va : il est difficile de savoir quelle génération a eu l’idée de donner ces surnoms aux tribus. Certains viennent des pays lointains d’Europe, que l’on retrouve dans les contes. Par exemple :
· Igilan (Angleterre/England) : dréhuisé en Igilan. C’est le cadre spatiotemporel où se déroulent les récits de Jaek et Méérie. Igilan correspond à Xepe et Hnaeu.
· Ladran (Londres/London) : Agele (Anglais) : Hnadro et Jokin.
· Alema (Allemagne) : Hnacaöm.
Les autres pays lointains évoqués :
· Neweiok (New York) pour Drueulu.
· Nugini (Nouvelle-Guinée) pour Hunëtë.
· Caina (Chine) pour Jozip.
· Zapone (Japon) pour Hunöj.
On trouve aussi des noms locaux, comme Co (Thio) pour Thuahaik.
Certains surnoms remplissent des fonctions précises ou évoquent des situations :
· Beikaco (pour Joj) : signifie, dans le cricket, le deuxième joueur qui ratisse la boule derrière le lanceur. Cela suppose l’existence d’un Bëikatru ou Bëiwan (que j’ignore). Joj est aussi le nom d’une danse traditionnelle de la tribu du même nom. Un jour, qui sait, Philippe Wejiemë et Mala, notre neveu et beau-fils, pourront peut-être ressusciter ce fehoa pour nous le faire interpréter lors des manifestations culturelles. Parions.
· Kirikitr (Mu) : c’est le mot dréhuisé pour cricket. Selon mes premières connaissances, ce jeu aurait été joué pour la première fois à Mu. D’autres sources indiquent qu’il aurait été introduit dans une tribu du Wetr ; à vérifier.
· Lalumi (Mucaweng) : c’est le verlan de Imulal, désignant la corbeille magique fixée au sommet du poteau central (à l’intérieur de la case). Lors d’une discussion, le frère Billy Wapotro était surpris : « Wws, tu m’étonnes. Je ne connais pas Imulal. Le vrai nom de cette corbeille en drehu est wene miny. »
Par ailleurs, « Amoureuse » (Tingeting) le plus beau. En drehu, Tingeting signifie aussi « La Paix ». Cela me ramène aux paroles de Pexy, lors de notre danse au LDK : « Zöruma la sataral » — à vous de traduire.
Samaritaine (Hnathalo) désigne le puits qui a servi à la construction de la cathédrale Saint-Jean Baptiste, au siècle dernier, si je ne me trompe pas. Ce puits se trouve de l’autre côté de la route, en face de l’édifice religieux.
Concernant Hnanem, Zavirob, Maolis, Sinöj, Hacetranu, Itreqe… nos anciens n’ont pas toujours été très inventifs. Ce sont souvent des diminutifs de leurs véritables noms : Hnanem pour Hnanemuaetra, ou en verlan, comme Maolis pour Siloam. Ils reprenaient aussi des surnoms liés à des fonctions ou à la géographie :
· Hacetranu (Hnase) : probablement pour évoquer la souffrance du déchirement lors des adieux sur les quais à Wé (Hnase).
· Sinöj (Qanono) : une partie de la tribu où, autrefois, les gens du Wetr et du Lösi se retrouvaient pour se livrer bataille.
· Orian (Xodre) : qui signifie « Orient » en référence à l’Est, là où le soleil se lève.
Certains surnoms m’échappent (ils sont en drehu) :
· Wangekö (Kumo) : un nom qui pourrait être une mise en garde, mais je ne suis pas sûr. Quand j’ai posé la question, on m’a répondu qu’il fallait faire très attention à l’évangile du Christ et à la coutume. Je ne pense pas que Wangekö ait été créé dans ce sens.
· Gaiulaz (Nang) : je n’en connais pas la signification.
· Bethela (Hapetra), Itreqe (Wedrumel), Lilozur (Tixa) et Faofor (Saint-Paul) : je n’ai pas d’explication non plus, cela m’échappe.
En conclusion : J’ai repris des surnoms très anciens. Je ne les maîtrise pas tous. Vous avez dû vous rendre compte par vous-mêmes. Les jeunes générations ont ensuite donné d’autres noms à leurs tribus, mais cela, comme le dit la chanson, c’est encore une autre histoire.












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