Nuelasin n°126 – 3 mars 2023

Bozusë. Aujourd’hui samedi, nous nous sommes retrouvés à Eika (presbytère de la tribu) pour débroussailler. Nous n’avons même pas mis beaucoup de temps vu que tous les jeunes se sont mobilisés tôt et en masse avec leurs débroussailleuses. À 9h30, le travail était terminé. Personnellement, je passais mon temps à bigophoner sous la véranda du socioculturel. Après le travail, tous les garçons et le responsable sont venus me rejoindre. Je recherchais à contacter quelques femmes dans mes connaissances pour une journaliste qui allait faire un reportage sur Mme Dewe. Une grande dame de lettres calédonienne. J’ai dit de prime abord, que je ne voyais pas Mme Dewe comme une écrivaine. Je la prenais plutôt comme une grande sœur de la génération du dessus, qui prenait toujours soin de nous qui arrivons après. Je me souviens de la fois quand nous avons refait la toiture du temple de Hunöj, au début des années 90, j’ai demandé des pièces à Dewe. Elle a signé un chèque en rajoutant en sus: « Hnaci (de Hnacipan) comme elle m’appelait, c’est pas pour faire la fête… » Je riais, et je la rassurais de remettre son geste au trésorier de notre Amicale. Je l’ai fait.

Quand je suis allé à Nouméa pour accompagner ma fille au lycée, j’ai rencontré Paul Néaoutyne dans une station service à Koné. Il faisait ses petites courses. Des bols de soupe, je suppose. Je disais à Elisa dans la voiture, que j’étais très heureux d’avoir fait la rencontre de ce grand monsieur. À l’internat du lycée Lapérouse, Élie Poigoune a pris la parole pour présenter le juvénat à nos enfants. Son intervention a retourné tout mon être. Oui. J’étais tout simplement en train de penser à Dewe. Des gens de ce gabarit-là, ont tout le temps fait l’objet de mon admiration. Oui, Dewe, elle me manque.

Bonne lecture à vous de la vallée. Wws

Dans la petite voiture de Maselo

  • Bonsoir Mme Irina quoi de nouveau ?
  • Oh ! Mr Maselo, c’est bien vous le plus heureux. Vous avez gagné au loto de l’école primaire, il parait.
  • Vous êtes plutôt drôle. Vous me jugez-là. Voyez, je suis cette eau calme dont le fond est bouillonnant et d’une activité intense. Par moment, je sens que je vais exploser.
  • Vraiment ! Je vous trouve plutôt d’une sagesse, euh … comment dire ?
  • Le Titanic a sombré à cause de la partie cachée de l’iceberg, n’oublie pas. Je suis endetté jusqu’au cou, mon épouse est très dépensière, elle va au kava avec des inconnus, ma fille qui était tout le temps malade est de nouveau en cloque, mon fils va de nouveau divorcer et la liste est longue…
  • Mais vous avez tout le temps le sourire.
  • C’est la façade que je soigne. Mme Irina, la vie, c’est cela. Une somme de toutes nos petites misères avec lesquelles on pousse les quatre vents avec…
  • Vous êtes plutôt chat, celui qui tournoie et qui retombe sur ses pattes. Bienheureux soyez-vous.

Je ne comprenais pas…

Au fait, je devrais écrire: « j’ai compris. » Quand on partait à l’internat dans nos années primaire & collège c’était vraiment souffrance. À Hunöj, ma grande sœur disait des mois après notre retour de l’internat, qu’elle avait pleuré. Mais moi, je ne l’ai jamais vue pleurer. Ni elle, ni maman. Elles étaient seulement debout au milieu de notre cour à nous regarder monter dans la benne de la camionnette du vieux Qaenge-qatr avec nos valises de linge et des sacs de fruits de saison. Des oranges et des mandarines (pour nous les enfants de la maison) et d’autres fruits de saison. Tout le monde de l’île connaissait les bienfaits que la Nature a accordés à notre tribu. Je vous jure. On partait pour le trimestre. On revenait après pour deux semaines de vacances. On a habitué après notre métabolisme à ce rythme scolaire. Aujourd’hui, cela fait seulement deux semaines que je n’ai plus vu ma fille et je ne vous dis pas ce que le vide a causé au fond de mon être. Je pensais que ma fille n’allait pas tenir. Je viens de l’avoir au téléphone. Elle était plutôt bien. Mademoiselle s’était vite adaptée à sa nouvelle vie. Conclusion: C’est M. Hnacipan qui est problématique. Pff ! Il pensait que sa fille allait tout le temps penser à lui. Niet.

Je me remis plutôt à faire revenir notre très chère maman dans ma mémoire, quand on quittait la maison. Moi, pour mes études et les autres pour le travail… je me remis aussi à penser à toutes les mères du monde. La force qu’elles ont à se retenir des instants de déchirement ! Quelle résistance. Admirable. Je crois enfin comprendre la forte capacité de la femme à résister à toutes épreuves. Madre de Dios ! Divine.

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