Nuelasin n°171 – 26 avril 2024

Bozusë, nous sommes samedi 20 avril 24. 15h14. Il n’y a personne à la maison. Ce matin. Elisa a pris la voiture pour aller à sa réunion à Koné. Je suis extrêmement seul. Seuls les chats, le bruit du ventilo et le chant des oiseaux meublent mon atmosphère de cette après-midi. À la sortie de l’ornière de la maison, il n’y a presque plus personne chez Wato. Là, où ont eu lieu les coutumes de deuil de Jacky Kitchine. Un vieux de la tribu. Il a déjà eu plus de 70ans. À Hunöj, dans le clan des Pöj, ils finissent les coutumes du “rester ensemble” pour Zybal. Un autre vieux de chez nous. Hier, en consultant mon compte à fond d’écran bleu, j’ai vu qu’à Ponoz, ils chantaient des taperas. J’aurais aimé partager ces moments intimes et de convivialité.

Ce soir, l’attention est tournée vers le centre culturel de Pomémi à Koné où a lieu le concert du groupe Marcus Gad accompagné de son groupe et de plusieurs invités. Hier, j’ai posé la question à Mme Noëlla sur le sujet. Elle me l’a confirmé. J’espère que le spectacle va bien se dérouler et qu’il n’y aurait pas de débordement ni d’incident pour entacher telle manifestation. Personnellement, je ne connais pas le groupe mais j’ai posé la question à quelques connaisseurs qui m’ont parlé du groupe en bien. Un bon ambassadeur pour porter la culture musicale hors de nos barrières côtières. À encourager.

Cette semaine vient de s’écouler avec des inspections qui se sont bien passées pour des collègues au collège. Une occasion de toujours faire connaitre notre collège hors de nos montagnes. Il est vrai que notre établissement est bien encastré dans la vallée. Les personnes qui découvrent notre collège pour la première fois s’exclament toujours de la présence de la végétation tout autour et au milieu de l’école. Ainsi va le monde.

L’école est une affaire de tous. En rentrant à la maison hier (lundi 22 avril) après mes cours, je rencontrais un jeune de la tribu. Je m’arrêtai et je l’appelai. C’était pour partager ma pensée: “Tu vois Tein*, faire l’école en 2024, c’était comme si on était toujours au temps de nos parents, c’est-à-dire dans les années 70. Les parents confient l’enfant à l’école et disparaissent. Et encore, c’était mieux avant. Ils disparaissaient du circuit scolaire de leurs enfants mais les pensions et les frets scolaires étaient dorénavant payées. Mais nous… c’est encore une autre histoire comme dit la chanson …

        Cartable. Je viens d’arriver dans mon bureau en revenant de la cantine et dans l’abri devant notre salle d’étude j’ai rencontré un jeune mince comme mon auriculaire. Je ne vous rajoute rien mais qu’il est maigre et… et son cartable que j’ai tenté de soulever est lourd. Ma photo des journées de l’époque de mon service militaire me revient et en force. Mais que le cartable est lourd. J’ai soulevé le cartable de Asaël. Allez ! Combien de kilos ? Impensable qu’un gosse de 6ème puisse trainer avec une telle masse toute la journée. Je lui ai conseillé de ne venir avec ses affaires de cours que pour la journée. « Mais M. c’est pour ce jour seulement. » m’a-t-il répondu. « N’es-tu pas en train de mentir ? » Lui rétorquais-je. « Non M. » Et il baissa la tête. Je suis resté quelques temps avec lui pour expliquer le risque de tout le temps porter des charges de cette sorte. J’espère en tout cas que nos échanges seront bien sûr compris et surtout mis à exécution. 

Et pour accompagner M. Maselo, je vous propose une ballade spéciale en souvenir de mes années collège à la mémoire de Mlle Pitet aujourd’hui au pays de nos aïeuls. Bonne lecture à vous et bienvenu aux trois nouvelles abonnées : Malia, Solange et Julia. Wws

Dans la petite voiture de Maselo

  • Je vois que vous avez raison M. Maselo. Regardez le pont-rail, on dirait qu’il a

commencé à pleuvoir d’ici.

  • Tout à l’heure, en discutant avec la vieille Maline à la fête, elle me disait qu’en

revenant de Koné, sa nièce qui conduisait était obligée de mettre les essuie-glaces et même qu’à un moment elle avait allumé les phares.

  • Moi, de la fête de l’écomusée, je voyais plutôt un arc-en-ciel qui couvrait une partie de la montagne en montant sur Tiéta.
  • Dieu merci, on a vraiment eu de la chance. Ceux qui revenaient de Koné n’avaient plus de pluie mais vraiment plus du tout à partir de Oundjo.
  • Et qu’est-ce qu’il y avait à Koné ?
  • Ben il y avait une vente dans le hall de la grande galerie. De beaux produits de nos

terroirs, mais la pluie a tout gâché.

  • Ben heureusement que la pluie n’était pas tombée à Voh, vous savez mon épouse n’avait pas d’abri pour vendre ses fleurs. C’aurait été la même misère que Koné.

Ballade des pendus

François Villon

Frères humains, qui après nous vivez,
N’ayez les coeurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
Quant à la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s’en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Se frères vous clamons, pas n’en devez
Avoir dédain, quoique fûmes occis
Par justice. Toutefois, vous savez
Que tous hommes n’ont pas bon sens rassis.
Excusez-nous, puisque sommes transis,
Envers le fils de la Vierge Marie,
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l’infernale foudre.
Nous sommes morts, âme ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

La pluie nous a débués et lavés,
Et le soleil desséchés et noircis.
Pies, corbeaux nous ont les yeux cavés,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais nul temps nous ne sommes assis
Puis çà, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charrie,
Plus becquetés d’oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Prince Jésus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu’Enfer n’ait de nous seigneurie :
A lui n’ayons que faire ne que soudre.
Hommes, ici n’a point de moquerie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

François Villon, Poésies diverses

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