Edito de la présidente de l’Association Présence Kanak

Je suis enfant des Évènements de 1984. Je suis surprise de voir comment cette jeunesse s’exprime aujourd’hui.

9 ans, j’avais à l’époque, et nous vivions dans la peur. Nous pouvions la sentir dans chacune de nos maisons, chacun de nos pas et ce sur l’ensemble du territoire.

Jamais on ne nous apprenait à exprimer nos émotions, nos sentiments. Au contraire, on nous à appris à les taire, à les enfouir au plus profond de nos petits êtres. Il ne fallait rien dire, il fallait se cacher. Même sur la route, le mot d’ordre c’était on se cache dans les brousses. Nous ne pouvions nous montrer : « Shuuuttt faut se cacher… Shuuut faut pas dire… »

Se faisant, nous avons grandi.

Et toujours on nous demande de

Taire notre Tristesse,

Taire notre Colère,

Taire notre Haine,

Taire notre Dégoût,

Et toujours on nous demande

D’exprimer notre Respect pour l’Autre

D’exprimer notre Amour pour l’Autre

D’exprimer notre joie pour l’Autre

Se faisant, nous avons grandi avec ses bagages.

Se faisant, nous avons eu des enfants.

Ces mêmes enfants à qui nous léguons ces bagages mais qui les refusent parce qu’ils ne leur appartiennent pas et les empêchent d’être.

Et ils l’expriment avec une telle violence, une telle lucidité, une maturité dans leur propos. Ces mêmes enfants qui ont été les oubliés sur ce chemin vers la Liberté pour Kanaky.

Je le ré affirme aujourd’hui : l’idée de pleine souveraineté soufflée un jour de 1977 lors d’un congrès à Bourail, c’était d’abord une revendication identitaire.

Pour construire un pays nous avons besoin, certes d’argent mais pour créer ces richesses il nous faut des Hommes et des Femmes debout. Qu’a-t-on fait ? … Nous avons privilégié le pécule. Les Femmes, les Hommes qui sont les âmes de ce pays ont été les grands oubliés dans la Construction de ce Destin Commun, de cette future Nation de Kanaky.

Aujourd’hui, nous nous étonnons de cette déferlante de violence de la part de notre jeunesse. Cette violence diabolisée sur le plan national alors qu’elle était prévisible. comme le dit un jeune sur une des multiples vidéos qui tourne : « Nous la jeunesse, on est sur la route, on n’a pas d’arme……Y’à des jeunes qui militent pacifiquement ….. C’est à nous la lutte, notre lutte est légitime ! Restons simples, restons pacifiques ! »

Malgré tout, encore aujourd’hui, comme l’on fait nos parents au lendemain des évènements de 1984, nous avons le devoir de le transmettre et de le dire à nos enfants :

« Restez pacifique les enfants, restez calme, vous valez mieux que ça. Nous sommes des êtres d’Amour et de lumière. L’autre aura toujours sa place auprès de nous malgré tout ce que nous avons pu subir les uns comme les autres. Les autres sont là, nous nous devons de faire avec eux, de prendre soin d’eux.
Accordons notre pardon pour que notre propre chemin soit clair comme l’eau de la source. Ce qui est passé est passé.
Relevons le défi encore et encore. Ce chemin est le nôtre à tous, nous avons tous choisi de le prendre ensemble. »

A cette jeunesse en proie de vie, merci pour cette libération !

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