Dans le cadre des travaux menés pour l’émergence d’un nouveau modèle économique calédonien, le gouvernement a organisé en juin 2023 un forum intitulé « Perspectives ».
De nombreux acteurs de la société calédonienne ont été conviés à la présentation des pistes d’action potentielles à mettre en œuvre, afin de relever les défis du changement structurel de modèle économique, dans lequel la Nouvelle-Calédonie est appelée à s’engager.
Une démarche participative
« Perspectives » est le fruit de larges consultations préalables auprès des acteurs clés de la société calédonienne (représentants de la société civile, syndicats, associations, entreprises, etc.). Plus de 200 entretiens avec plus de 500 personnes ont été menés, ainsi que 200 contributions orales et écrites recueillies, afin de dresser un diagnostic de l’économie calédonienne. Ces entretiens ont permis de recueillir une vision partagée des enjeux majeurs et incontournables dans la construction d’un nouveau modèle économique calédonien
À partir des grands axes identifiés, Olivier Sudrie, économiste spécialiste des économies ultramarines du cabinet d’études DME, a établi un bilan macro-économique du modèle calédonien, l’enjeu étant de faire émerger des pistes d’action potentielles à mettre en œuvre pour l’élaboration d’un nouveau système.
Un modèle calédonien à bout de souffle
De la fin des années 1990 jusqu’au début des années 2010, la Nouvelle-Calédonie a bénéficié d’une croissance exceptionnelle, conduisant à une augmentation de 30 % du niveau de vie moyen des Calédoniens. Depuis une dizaine d’année, le modèle peine néanmoins à créer de la richesse, avec une tendance à la baisse et un produit intérieur brut (PIB) qui chute en moyenne de 1,6 % par an, depuis 2017. Quatre caractéristiques de l’économie calédonienne permettent en partie d’expliquer cette orientation :
- des moteurs de croissance principalement exogènes : les transferts publics métropolitains et les exportations de nickel ;
- le poids important des dépenses publiques conjugué à une faible marge de manœuvre en termes de politique économique ;
- la très faible compétitivité de l’économie locale ;
- de très fortes inégalités sociales qui brident la croissance.
Des défis à relever
La Nouvelle-Calédonie s’est engagée à rétablir ses équilibres financiers auprès de ses bailleurs et notamment de l’agence française de développement (AFD) sur la période 2022 – 2024, ce qui induit des dépenses supplémentaires (144 milliards de francs). Elles relèvent à 80 % du domaine social (RUAMM, agence sanitaire et sociale, aide médicale gratuite) et nécessitent un besoin de financement important, qui pourrait impliquer, selon la trajectoire empruntée, des prélèvements obligatoires conséquents.
Ce scénario d’orthodoxie budgétaire contribuerait ainsi à ralentir davantage la croissance économique et semble difficilement tenable d’un point de vue social, dans un contexte de démographie déclinante.
Cependant, cette orientation morose peut être évitée par une réforme du modèle économique calédonien en faveur d’une croissance plus forte, plus soutenable et plus juste et d’une économie moins dépendante de l’extérieur grâce à une production locale plus compétitive.
Engager le changement
6 grandes priorités ont ainsi émergé des constats identifiés à l’issue des consultations auprès de la société calédonienne :
- la cohésion sociale et la réduction des inégalités ;
- la gouvernance et la concertation ;
- le développement et la résilience ;
- le nickel et la transition énergétique ;
- la biodiversité et le développement durable ;
- l’insertion régionale.
La Nouvelle-Calédonie est à un moment charnière de son histoire pour lequel il apparaît nécessaire de bâtir un nouveau modèle soutenable dans le temps, ne s’appuyant pas uniquement sur l’industrie du nickel mais aussi sur son potentiel naturel, humain et culturel exceptionnel encore insuffisamment valorisé. Les inégalités sociales, frein à la cohésion de la société, devraient être résorbées grâce notamment au déploiement d’une économie sociale et solidaire, inspirée des pratiques traditionnelles.
Le nouveau modèle économique doit ainsi s’appuyer sur une concertation efficace entre les différentes composantes de la société et un système institutionnel plus agile, afin de bâtir une gouvernance apaisée. D’autre part, les efforts en faveur de l’accompagnement à l’innovation et à l’entrepreneuriat doivent également être poursuivis pour faire de la Nouvelle-Calédonie un territoire innovant et compétitif qui s’appuie sur ses spécificités océaniennes. De plus, son patrimoine minier exceptionnel doit faire l’objet d’une valorisation optimisée tout en renforçant la résilience de l’industrie du nickel. La Nouvelle-Calédonie bénéficie en outre d’un fort potentiel de rayonnement qui mérite d’être davantage exploré et développé à l’échelle régionale.
Les leviers d’une politique économique plus juste, plus forte et plus soutenable
Pour atteindre ses objectifs de compétitivité et de justice sociale, la Nouvelle-Calédonie dispose de quatre leviers majeurs sur lesquels elle doit s’appuyer :
- le développement de la concurrence ;
- l’action sur les prix, au travers de la politique fiscale et budgétaire (accroissement de la fiscalité sur les hauts revenus, désindexation progressive et partielle des salaires dans la fonction publique territoriale) ;
- l’action sur les coûts par la réduction des cotisations sociales ;
- le renforcement de l’inclusion économique à travers le développement de l’économie sociale et solidaire.
Une mission chargée de mettre en œuvre le plan d’actions validé lors du forum sera créée afin d’initier les changements nécessaires à la réforme du modèle économique calédonien.
photo : Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
documents à télécharger ici : https://gouv.nc/actualites/07-06-2023/reflechir-au-nouveau-modele-economique-caledonien












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